Paroles d'experts sur la finance et le climat
A l’occasion du Climate Finance Day qui a lieu à Bercy ce lundi 11 décembre, et du One Planet Summit, organisé le 12 décembre par l’Elysée, le Groupe BPCE se joint à l’ensemble des acteurs mobilisés autour des financements pour une économie durable et bas carbone.
Deux ans après la signature de l’accord de Paris lors de la COP21, ces deux rendez-vous internationaux vont permettre de mettre en avant la mobilisation du secteur financier dans son ensemble et de souligner la pertinence des solutions issues de la finance privée pour lutter contre les changements climatiques. Témoignages :
Laurent Roubin, Directeur général Banque de proximité et Assurance (BPA) Groupe BPCE

"C’est un mouvement de fond et j’ai la conviction que la croissance verte est non seulement un enjeu de société, mais également un réel relai de croissance et de PNB pour notre groupe."
"L’environnement, la rareté, le coût des ressources naturelles constituent un vecteur important de la transformation économique que nous vivons. Elle explique le redéploiement massif d’investissement des groupes industriels dans toutes les filières économiques pour concevoir et produire mieux avec moins. Cette transformation est très intense dans des secteurs exposés comme l’énergie ou le recyclage dans lesquels on parle de révolution mais elle touche tout le monde. La résultante est la création de nouveaux marchés : énergies renouvelables, agriculture biologique, chimie verte, immobilier durable … C’est un mouvement de fond et j’ai la conviction que la croissance verte est non seulement un enjeu de société, mais également un réel relai de croissance et de PNB pour notre groupe. Nous devons être en mesure d’intégrer cette dimension dans notre développement afin de contribuer à atteindre nos ambitions commerciales. Pour cela, nous devons être en capacité de les comprendre et de les accompagner car ce sont nos clients."
Philippe Zaouati, Directeur général de Mirova, Président de « Finance For Tomorow », membre du Hleg (High Level Expert Group On Sustainable Finance)
« Aujourd’hui le climat a besoin de la finance. On le sait et tout le monde en est conscient aujourd’hui, et la finance a besoin de comprendre comment le climat va avoir un impact sur ses équilibres, sur sa stabilité. La notion de risques et la notion d’opportunités sont essentielles »
"Cette semaine est une semaine extrêmement importante pour le climat et pour la finance. Au cours de cette semaine se déroule le grand sommet international qui a été organisé par le Président de la République à l’occasion du 2e anniversaire de l’Accord de Paris. Et c’est surtout le sujet des financements qui va être traitée à Paris. Comment on démontre que les décisions qui ont été prises à Paris sont maintenant opérationnelles, qu’il y a des exemples sur le terrain qui montrent que c’est irréversible, quels que soient les événements et, notamment, le retrait des américains ?
Aujourd’hui le climat a besoin de la finance. On le sait et tout le monde en est conscient aujourd’hui, et la finance a besoin de comprendre comment le climat va avoir un impact sur ses équilibres, sur sa stabilité. La notion de risques et la notion d’opportunités sont essentielles. Et donc on attend surtout que les acteurs du monde financier non seulement fassent des annonces sur la sortie de financement d’industries extrêmement carbonées, mais des annonces également qui vont changer leur business model profondément, la façon dont on fait le métier de financier. C’est là où l’on verra si cette semaine sera un succès ou non." La suite en vidéo
Arnaud Berger, Directeur Prospective, Economie verte et RSE au sein du pôle BPA du Groupe BPCE
"La vision d’une banque universelle et qui plus est, coopérative, est essentielle, car elle assure le trait d’union entre le financement des PME et le financement des acteurs régionaux qui assurent la demande de l’offre verte portée par les grands investissements et la banque d’affaire"
Paris accueille le 11,12 et 13 décembre 2017, plusieurs conférences sur la finance climat avec en point d’orgue le One Planet Summit, portée par la présidence de la République et dédié à la finance publique et privée au service de l’action climat. Comment cette question du climat est-elle abordée dans une vision bancaire et qui plus est, commerciale ?
"Depuis la COP21 et l’accord de Paris, en toile de fond des négociations sur la lutte contre le changement climatique, se cache une compétition économique autour des filières bas-carbone que constituent les énergies renouvelables. Depuis 2009, l’énergie verte, photovoltaïque et éolienne en tête, devient beaucoup plus compétitive que les énergies classiques, charbon et pétrole. Ce bouleversement du marché de l’énergie entraine dans son sillage toutes les autres filières industrielles et commerciales (cf. immobilier, mobilité, industrie….).
Concrètement ce changement de choix d’énergie nécessite des investissements considérables que les Etats n’ont plus vocation à soutenir seul, au vu de l’amélioration de la profitabilité, mais à accompagner en facilitant les règles d’intervention des banques privées. C’est dans ce cadre que les acteurs de la finance sont associés aux négociations climatiques avec un momentum qui y est consacré ces 3 jours à Paris.
L’objet des négociations internationales sur la finance climat est double :
- Amplifier les investissements verts
- Communiquer et sensibiliser tous les acteurs au risque climatique
Cela tend à organiser le marché de la croissance verte et renforcer la coopération entre les différentes filières et les pays."
Pourquoi le Groupe BPCE est-il si présent dans ces négociations ?
"Parce que le Groupe BPCE a su développer plusieurs expertises sur ces marchés en structuration. Mais aussi afin de contribuer à la construction de ces nouveaux standards qui deviennent hautement concurrentiels et éviter de favoriser des projets trop peu représentatifs de la croissance verte. Car l’enjeu est bien celui d’une compétition internationale entre grandes zones économiques.
La spécificité du Groupe BPCE est :
- d’une part, d’apporter une expertise sur un marché où le groupe fut pionnier en France et parmi les précurseurs en Europe : le financement vert local, celui qu’il convient de pouvoir offrir à tous les clients PME et particuliers et acteurs de l’économie régionale ;
-d’autre part, d’apporter le savoir-faire d’une banque universelle en portant et soutenant des dispositions particulières en matière d’assurances vertes, de fonds de garantie, de ratio spécifiques tel que le « Green supporting factor » par exemple. Ce ratio permettrait de diminuer le besoin de fonds propres exigibles lors des crédits verts. Il rendrait donc plus simple l’accès aux financements verts.
Le succès des négociations climat se mesurera certes à la capacité des nations à mobiliser les investissements bas-carbone et les assurances pour contenir à 2 voire 1,5° la hausse du réchauffement mais aussi à favoriser la création d’emplois à travers le développement des filières vertes.
Or la vision d’une banque universelle et qui plus est, coopérative, est essentielle dans les négociations actuelles pour lier ces deux enjeux car elle assure le trait d’union entre le financement des PME, qui sont les leviers d’emplois aujourd’hui en France et le financement des acteurs régionaux, qui assurent la demande de l’offre verte portée par les grands investissements et la banque d’affaire."
Delphine Bartre, en charge notamment de la coordination des risques climatiques au sein de la Direction des Risques, Conformité et Contrôle Permanent du Groupe BPCE
« Les informations sur les conséquences financières du changement climatique, ainsi qu’une appropriation opérationnelle des enjeux climatiques, sont les facteurs clés de la gestion de ces risques par les banques. »
Le risque climatique apparait comme un nouveau risque auquel les banques doivent faire face. Pourquoi les banques se sont-elles emparées de ce sujet ?
"En réalité le risque climatique n’est pas un nouveau sujet pour les banques. Il a toujours existé, seulement les banques le prenaient en compte en tant que risque opérationnel, par exemple si une agence ou un distributeur automatique de billet étaient touchés par une intempérie. Ce risque était donc bien identifié par les banques pour assurer la continuité de services auprès de leurs clients. En revanche, ce qui a changé, c’est la prise de conscience autour de ce risque qui dépasse la simple maintenance de nos infrastructures, puisqu’il impacte, directement ou indirectement, l’activité de nos clients. Par-là, je parle du risque physique auxquels certains de nos clients doivent faire face lorsqu’ils sont exposés à des évènements climatiques, qu’ils soient soudains (ouragan, intempérie inondations..) ou progressifs (par exemple l’augmentation significative de température). Le Groupe BPCE a bien conscience de ces sujets du fait de son ancrage régional qui le rend encore plus proche de ses clients. Car notre rôle, en tant que banquier, est d’accompagner tous nos clients (particuliers, professionnels et entreprises) confrontés à des situations de risque climatique qui peuvent affecter leur activité et de leur proposer des solutions.
Nous accompagnons aussi les clients dans leur transition vers une économie bas carbone, c’est l’autre facette du risque climatique : tout l’enjeu consiste à éviter des chocs de transition et des pertes de valeur brutales dans certains secteurs. Par exemple, une PME qui change sa flotte de véhicules et que nous allons financer pour acheter des véhicules à impact plus limité en gaz à effet de serre et moins consommateurs d’énergies fossiles.
Si ce sujet a pris plus d’ampleur ces dernières années auprès des banques, c’est parce que des initiatives ont été lancées en ce sens par certains pays et par des organisations internationales. La France a été l’un des premiers États à introduire un ensemble de mesures cohérentes promouvant une meilleure intégration du développement dans la durée sur tous les secteurs de l’économie, y compris le secteur financier. L’étape marquante a été l’adoption le 17 août 2015 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Cette loi définit une stratégie de long terme, et encourage une appropriation du sujet par le secteur financier, notamment au travers de l’article 173. Il s’agit pour les banques de mettre en œuvre des tests de résistance représentatifs des risques associés au changement climatique et pour les investisseurs institutionnels de communiquer sur la manière dont ils prennent en compte les critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) dans leur politique d’investissement et de gestion des risques. Au niveau international, un groupe de travail, lancé par le Conseil de Stabilité Financière du G20, a été constitué dès 2015. Piloté par le secteur privé, il a publié des recommandations pour améliorer la transparence des entreprises de tous les secteurs, financiers et non financiers sur les questions climatiques.
Au niveau du Groupe BPCE, nous avons d’ailleurs mis en place une organisation ad hoc pour bien gérer tous ces sujets. Je m’occupe justement de coordonner les différentes actions à mener sur le risque climatique, auprès de tous nos clients (particuliers et entreprises), en collaboration avec la direction Développement Durable groupe et en lien avec tous les établissements du groupe (les Banques Populaires, les Caisses d’Epargne, mais aussi nos filiales Natixis, Crédit Foncier, Banque Palatine etc..). L’un de nos chantiers actuels est de créer une méthodologie commune pour l’identification des actifs potentiellement impactés, mais aussi les actifs bas-carbone, dans tous les secteurs d’activité, en France et en Europe. Cette classification permettra, ensuite, d’apprécier leur évolution en fonction des projections de scenario climatique.
Le plan stratégique du groupe traduit ces ambitions par la priorité donnée à la croissance verte avec des objectifs à horizon 2020 de plus de 10 Md€ octroyés pour le financement de la transition énergétique, plus de 25 Md€ de collecte nette d’épargne responsable, et deux émissions annuelles de "green bonds".
En bref, les informations sur les conséquences financières du changement climatique, ainsi qu’une appropriation opérationnelle des enjeux climatiques, sont les facteurs clés de la gestion de ces risques par les banques."
Vous avez assisté aux conférences organisées à l’occasion du Climate Finance Day et du One Planet Summit. Quelles sont les choses à retenir pour les banques et autres acteurs financiers ?
"Je dirais que trois grands thèmes ont émergé de toutes les discussions : la transparence, l’urgence, et l’action.
La transparence de l’information a été le maitre mot des discussions du Climate Finance Day. Une représentante du Groupe d'experts auprès de la Commission Européenne a rappelé que dès 2010, le constat était fait d’un manque de communication et de publication sur le risque climatique. L’exposition de la finance aux risques climatiques majeurs existe, comme cela s'est vu pour l'ouragan Irma, et confirme la nécessité d’en informer les investisseurs. La réglementation bancaire s'est concentrée sur la liquidité, l'efficacité du marché et la solvabilité, mais il faut maintenant une vision à long terme alignée à l’objectif d’économie bas-carbone, qui passe par une plus grande transparence et la publication d’un rapport intégré des entreprises. Un des enjeux aujourd’hui est d’ailleurs de trouver au niveau européen une taxonomie, c’est à dire une classification unique pour aider au suivi des risques afin de permettre aux investisseurs, y compris les particuliers, de prendre leur décision de gestion et d'investissement. Ce sujet est également intégré au calendrier de la Commission Européenne, puisque celle-ci présentera son plan d'action en matière de finance durable le 22 mars 2018. Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, a annoncé le développement de nouveaux produits d’épargne grand public pour le climat, notamment des supports verts dans les contrats d’assurance vie, ainsi que la mobilisation pour des projets ayant un impact climatique favorable des sommes versées sur les livrets de développement durable et solidaire (LDDS) centralisés à la Caisse des dépôts. Dans sa recherche d'exemplarité, le gouvernement continuera à émettre des obligations vertes. Le ministre a également annoncé l’installation d’un conseil d’évaluation de ces obligations et l’adhésion aux principes de l'initiative Green Bond Principles.
L’urgence et l’action ont ensuite été au cœur des discussions sur le climat. Tout au long de ces 2 jours et en particulier au One Planet Summit, les leaders ont répété que nous n’avions plus le temps de réfléchir et qu’il fallait dorénavant agir, et vite. Des enfants ont interpelé les dirigeants politiques et économiques sur l’urgence de mettre en œuvre les moyens nécessaires aux objectifs annoncés. Des phrases marquantes comme « nous n’avons pas de planète B » ont montré la nécessité de l’implication de tous les pays et de tous les acteurs économiques, pour œuvrer ensemble dans la même direction et répondre à cette urgence. Il s’agit d’une mobilisation globale, qui passe d’abord par des actions locales, point évoqué par les maires des capitales. Pour le Groupe BPCE, je pense que la présence en région, proche des acteurs locaux, lui permet d’être bien positionné pour agir.
Au cours de ces deux jours, j’ai pu constater que l'Accord de Paris se concrétise et se transforme en une réalité mondiale : les Nations Unies, les Etats, la Banque Mondiale et les acteurs financiers privés ainsi que les particuliers investissent dans la lutte contre le changement climatique, dans la transformation de l'énergie mondiale et la protection de la biodiversité. Nous savons que ce sera un long chemin mais l'alignement de tant de domaines de l'économie mondiale et l’implication du système financier m’ont donné le sentiment que les moyens sont en train d’être engagés pour répondre à l'urgence et l'ampleur requises. Les ambitions de chaque maillon de la chaine seront relevées avant 2020 dans le cadre du processus des Nations Unies sur le changement climatique.
Ces promesses sont très concrètes, et commencent dès aujourd’hui. En effet, les nombreuses annonces faites par les acteurs publics et privés correspondent à des décisions dont l’application commence dès maintenant, en particulier lorsqu’il s’agit de cesser le financement d’activités à fort impact carbone. Les investissements concernent des projets à mettre en place dès 2018. Le représentant de la Commission européenne a annoncé, en avance de son plan d'action à venir en mars 2018, l’application au niveau européen d’articles de la loi française de transition énergétique pour la croissance verte et des initiatives françaises comme le Green Supporting Factor. La France marque sa position de pionnier dans ce domaine. D’ailleurs il a été acté que le Climate Finance day serait un évènement à réitérer chaque année afin de faire un point sur leurs annonces.
Au sein du Plan stratégique 2018/2020 du Groupe BPCE, le financement des énergies renouvelables, l’investissement responsable des particuliers et l’émission d’obligations vertes (green bonds) s’inscrivent parfaitement dans la logique de ces journées dédiées à la lutte contre le changement climatique.
Au-delà de ces trois thèmes que sont la transparence, l’urgence et l’action, je retiens l’intervention de Bruno Le Maire au Climate Finance day qui a exprimé très clairement la volonté politique de voir les acteurs financiers se saisir de l'accompagnement du changement climatique. Et il a d’ailleurs conclu "la finance sera verte ou ne sera pas". En conclusion du One Planet summit, le Président de la République a donné rendez-vous dans un an afin de suivre l’évolution des engagements. Ces annonces marquent pour moi un tournant dans la prise en compte du changement climatique et une orientation conjointe des acteurs financiers et économiques et des politiques écologiques et budgétaires. Je suis fière d’avoir assisté à l’engagement pris pour un environnement plus durable car « agir pour la planète, c’est agir pour les générations futures ».
Le Groupe BPCE est bien positionné pour participer à ce mouvement et j’espère y contribuer au travers de mon action professionnelle".
Sujet lié
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